Néolibéralisme

De Alternative Sétoise
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François Commeinhes et le « Supplément d’Âme »[ ]

Vincent

(Mairie de Sète - voir ici les autres affiches)

J’ai été consterné, il y a quelques mois, par les vœux 2019 de la majorité municipale. Affichés un peu partout dans la ville, une tielle, un pavois, une petite barque à moteur dite « sapinou », encadrés à la manière des anciennes photos de famille, comme autant « d’Appellations Sétoises Protégées ». Un design kitch, sans doute à prendre au second degré dans l’esprit des concepteurs, et un slogan principal à prendre au pied de la lettre : « Sète, le Supplément d’Âme »…

À l’évidence, le message s’adressait d’abord aux touristes et aux nouveaux Sètois, tombés sous le charme de la ville. Souriez, vous êtes à Disneyland. Parallèlement, il adressait aux « Sétois de souche » un message bien différent : Souriez, vous êtes Mickey Mouse et Pluto le chien… Artisans et entrepreneurs, vous devriez vous en sortir encore cette année, car grâce à l’équipe municipale, votre petite entreprise a trouvé sa baraka

Et la bonne année dans tout ça ? La pipe de Brassens a-t-elle vraiment quelque chose à voir avec le bonheur ? Ce Maire est-il encore capable de souhaiter la bonne année à ses administrés, en toute simplicité ?

En l'occurrence, ces affiches visaient chacun d’entre nous en jouant sur ces deux messages contradictoires. Elles prétendaient nous faire entrer dans la connivence de cette identité partiellement authentique et partiellement « toc », en fonction de l’interlocuteur. Elles disaient au fond la même chose aux travailleurs associatifs, idéalistes et engagés, qu'aux artisans et entrepreneurs sétois, selon une logique typiquement néolibérale : cette année encore, votre supplément d’âme sera marge de profit.

Sauf que l’âme néolibérale ne relie personne. Par définition, elle a pour seule fonction de mobiliser les uns et les autres « à l’insu de leur plein gré », en vue d’une maximalisation des perspectives de profit (notamment dans la spéculation immobilière). Le néolibéralisme dresse les « Sétois de souche » contre les « bobos », et inversement, en les forçant tous à se vendre, de sorte qu’il ne leur reste plus qu’à rire méchamment les uns des autres.

Sans parler de ceux qu’on n’entend pas, qui ne sont là que pour construire les immeubles : Sétois d’origine contrôlée, qui gardent en eux la nostalgie d’un pays lointain, mais dont les enfants n’ont pour eux plus que la rage, « faire sauter la Saint Louis »


Voilà la réalité Sétoise, dont ces affiches voulaient nous faire la pédagogie. L'obscénité de la démarche ne les a même pas choqués, tant cette équipe municipale est enfermée dans son monde, l’excitation malsaine de l’entre-soi.

(Vincent Planel)

À l’Alternative Sétoise, nous sommes liés par autre chose. Nous n’avons pas les solutions d’avance, mais seulement une certitude : la singularité de Sète n’est pas une « ressource », une « identité » privatisable, c’est la singularité d’une rencontre. Sète pourra continuer d’attirer à elle - et il faut reconnaître à François Commeinhes de l’avoir montré - mais sans avoir à se travestir pour autant. Car si la ville possède une singularité culturelle forte, c’est qu’elle a su intégrer tous ses travailleurs, et que des intellectuels en rupture de ban y ont trouvé refuge. Tout ça pour qu'aujourd’hui, cette singularité serve de présentoir à une offre culturelle sélectionnée par Paris, dans un cadre pittoresque et ensoleillé. Nous pouvons surprendre autrement qu’avec des joutes languedociennes. Nous pouvons accueillir la révolte qui peine à s’organiser ailleurs. Nous pouvons ressusciter notre port, en relevant les défis de notre temps. Nous ne disons pas que ce sera facile, mais Sète nous y engage.